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mardi 6 juillet 2010

Ça roule pour Nadal !


Vainqueur en trois sets de Berdych en finale, le Majorquin a réussi son deuxième doublé Roland-Garros - Wimbledon en trois ans.

Un an après avoir dû contempler la finale Federer-Roddick à la télévision, Rafael Nadal s'est offert hier une roulade de bonheur sur le gazon du Temple. Cette manière enfantine de célébrer son deuxième titre à Wimbledon, son huitième du Grand Chelem, redonnait pour un instant à un sport aussi codifié que le tennis un air de jeu de cour de récréation. Il traduisait aussi une joie si sincère chez un champion pourtant déjà richement titré, à vingt-quatre ans, qu'on ne peut mettre en doute son plaisir de jouer et de gagner. Ni son envie de continuer.

Cette envie doit inspirer de la crainte à tous ses rivaux. En particulier à Roger Federer, pour lequel les occasions de regagner le premier rang mondial risquent de se faire rares si la santé du Majorquin ne le trahit pas. Par sa victoire hier, Rafael Nadal a ramené l'histoire du tennis dix-huit mois en arrière quand, vainqueur de son premier Open d'Australie après avoir réussi le premier doublé Roland-Garros - Wimbledon depuis Björn Borg, il avait poussé le Suisse aux larmes. Il paraissait alors sur le point d'établir son pouvoir absolu sur le circuit masculin. L'état défectueux de ses genoux facilita la tâche de Federer pour compléter son propre palmarès avec un doublé Roland-Garros - Wimbledon en 2009. Si le traitement que doit subir son genou droit cette semaine est aussi efficace que celui qui a remis son genou gauche en état, le Majorquin paraît désormais de taille à défendre son rang sur tous les terrains, même celui de l'US Open, où il n'a encore jamais brillé.

Le service et le slice pour alliés

Car hier, pour gagner son deuxième titre du All England Club, Rafael Nadal a exploité une de ses qualités majeures et fort méconnues : l'adaptabilité. Perturbé, comme Berdych, par un vent sournois, il fut loin de pratiquer son meilleur tennis. Plus tendu qu’à l'habitude, peut-être parce qu'il disputait la première finale de sa carrière en Grand Chelem dont il fût aussi outrageusement favori, il connut des difficultés pour libérer son bras dans l'échange. Mais il sut tirer profit de son extraordinaire pouvoir de concentration et de son intelligence du jeu pour empêcher Berdych d'exploiter sa propre puissance de feu.

Qui aurait cru par exemple qu'un jour Rafael Nadal gagnerait une finale du Grand Chelem grâce à l'excellence de son service, son supposé point faible ? Et pourtant, face à ce serveur redouté, il présenta hier un bilan de services non retournés favorable. Son slice déportant lui apporta quasiment le point à tout coup dans la diagonale des avantages. Dans le jeu, c'est lui qui prit le plus de risques payants. Son coup droit ne fonctionnait pas aussi bien qu'il l'aurait voulu ? Il n'hésita pas à user de son revers slicé. Un slice très vilain, flottant, bien moisi, dans lequel Berdych patina à loisir, entre autres sur une de ses quatre balles de break du match.

L'avenir lui appartient

Car, bien sûr, comme contre Andy Murray en demi-finales, le Majorquin donna à son adversaire une leçon sur la manière de jouer les fameux points importants qui comptent double. Toujours il sortit le coup juste, alors que le Tchèque, comme par hasard, manquait un premier service, prenait une initiative mal venue ou, plus souvent, restait trop passif pour forcer la décision.

Non, Tomas Berdych n'a pas totalement manqué sa première finale du Grand Chelem. On l'a même trouvé étonnamment tonique dans les tout premiers jeux de la partie. Mais, comme souvent après un gros quart d'heure de présence sur le court, une fois dissipé l'effet du conditionnement prodigué au vestiaire, tout le poids de l'événement est venu écraser sa poitrine. Comme si les coups de Nadal ne faisaient pas assez mal. Et, sans surprise, vers la fin de chacun des trois sets, pression plus agression provoquèrent la soumission.

Le seul moment où le cours de la partie aurait pu sinuer fut le premier jeu du deuxième set. Quand, au lieu de foncer vers la victoire, libéré par le gain de la première manche, Rafael Nadal sembla lui aussi fléchir sous le poids de ses rêves. Son fidèle service cracha deux doubles fautes dans un jeu long de près de dix minutes, l'exposant à trois balles de break. Sur les trois, il prit l'initiative : service, coup droit, montée au filet renvoyèrent Berdych à ses illusions.

« Illusion » est justement un mot qui revient très souvent dans les propos de l'Espagnol en anglais. Ce faux ami linguistique désigne dans son esprit la volonté et le désir de bien faire. Après son parcours à Wimbledon, ses victoires sur Federer et Djokovic, Berdych a prouvé qu'il était capable lui aussi d'avoir de grandes « illusions ».

Celles de Rafael Nadal se situent à un niveau plus élevé encore. Avec ses huit titres en Grand Chelem, le voilà désormais à la hauteur des Andre Agassi, Ivan Lendl ou Jimmy Connors. À mi-chemin du record de Roger Federer si celui-ci ne l'améliore pas. Il est déjà l'homme du présent, mais l'avenir lui appartient.

article de l'Equipe publié le 19 avril CA ROULE POUR RAFA ! écrit par PHILIPPE BOUIN

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"Gagner contre un champion comme Rafael signifie beaucoup pour moi. Rafael est un joueur fantastique. Il va être présent longtemps et je suis content d'avoir gagné ce titre avant qu'il ne les prenne tous" --Roger Federer