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mardi 20 avril 2010

Au bonheur de l'ocre


En retrouvant la terre battue, Rafael Nadal a repris des couleurs, gagné son premier titre en onze mois et versé une larme de bonheur.

MONTE-CARLO de notre envoyé spécial

MESSAGE PERSONNEL pour Roger Federer : « Mets-en un coup à l'entraînement, Roger, car on a retrouvé Rafael Nadal, le vrai Nadal. » Égaré, l'an dernier, quelque part entre Madrid et Roland-Garros, le Majorquin a refait surface, dans un grand tourbillon d'écume, sur son court préféré, celui du Monte-Carlo Country Club, où il s'est imposé pour la sixième année d'affilée. Et il a déjà braqué un oeil gourmand vers Roland-Garros, qu'il rejoindra dans cinq semaines après des passages par Barcelone (cette semaine), Rome et Madrid.

Depuis onze mois, et sa victoire à Rome le 3 mai 2009, l'ogre de l'ocre avait l'estomac vide : pas le moindre titre à se mettre sous la dent en treize tournois. Privé de l'amortisseur de ses genoux, son jeu avait brinqueballé jusqu'au bout de la saison. Puis, cette année, après une rechute à Melbourne, genoux et jeu réparés, la tête avait flanché dans les moments cruciaux à Indian Wells et à Miami. Tel un héros mythologique, en reposant le pied sur la terre de ses premiers exploits, il a aussi retrouvé toutes ses armes.

Sur son visage, une larme

Hier, en finale, Fernando Verdasco ne pesa finalement pas plus lourd que Thiemo De Bakker ou Michael Berrer dans les deux premiers tours, réduit à un seul tout petit jeu de consolation : 6-0, 6-1. Du brutal. Le cou coincé dès le troisième jeu, sans doute à force de frapper toutes ces balles bien au-dessus de son épaule, il réussit bien quelques coups fumants, mais souvent après une prise de risque insensée ou au terme d'efforts éreintants, comme ce point achevé à la trente-deuxième frappe par une amortie, après que Nadal eut ramené une première amortie, un lob et un smash. À genoux, Verdasco salua cet exploit qui lui donnait une balle de break pour revenir à 4-2 dans le second set. Il ne put la concrétiser. Et pourtant, l'émotion avait fait irruption dans la partie au début de ce jeu, Nadal servant à 6-0, 4-1, à deux longueurs de la victoire. Soudain ses coups perdirent de la profondeur et son oncle Toni se leva plus souvent qu'à son tour dans les gradins. En vue de la victoire, ses nerfs s'étaient noués. Eh, oui ! On a beau s'appeler Nadal, avoir gagné trente-six tournois dans sa carrière et trente et un matches de suite sur ce court, on a beau mener neuf victoires à zéro contre son adversaire du jour et le malmener comme un punching-ball, l'habitude de gagner se perd et la perspective de la victoire perturbe. Mais cinq balles de break sauvées plus loin, le bûcheron retrouva tout son allant pour conclure avant de s'effondrer sur le court puis de sécher une petite larme sur son fauteuil, à la Federer : « C'est vrai, à 4-1, j'étais nerveux. Je n'avais pas gagné de tournoi depuis un moment et j'avais ma chance. Et puis, sur la chaise, j'ai repensé à tout le travail accompli. J'ai retrouvé mon niveau depuis le 1er janvier. J'étais prêt à regagner, mais remporter un tournoi comme Monte-Carlo est toujours émouvant. Je n'aurais jamais pensé le gagner six fois de suite. » Sonné, le vaincu énonça un verdict péremptoire : « Quand il joue comme ça, il est imbattable (sur terre battue). » « Je ne vois qu'un grand Roger pour le battre, estimait Guy Forget. Mais je ne sais pas s'il aurait aimé le jouer aujourd'hui. » Alors, au boulot, Roger, au boulot ...

article de l'Equipe publié le 19 avril AU BONHEUR DE L'OCRE écrit par PHILIPPE BOUIN

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"Gagner contre un champion comme Rafael signifie beaucoup pour moi. Rafael est un joueur fantastique. Il va être présent longtemps et je suis content d'avoir gagné ce titre avant qu'il ne les prenne tous" --Roger Federer